Résumé des épisodes précédents
Après les déboires des années 2014-2015, la BIU Santé a fait l’objet d’un rapport (non public) par Françoise Legendre, de l’Inspection générale des bibliothèques (seul document public, ce résumé dans le rapport annuel de l’IGB, p.26-27).L’actu du moment
Le 24 avril 2017, Frédéric Dardel, président de l'université Paris Descartes, a informé les directeurs de la BIU Santé et de la BU de Paris Descartes (SCD) de son projet de fusionner ces deux bibliothèques, en se basant sur certaines conclusions du rapport Legendre. Un cabinet de consulting, Plein Sens, a été mandaté pour proposer une méthodologie pour ce projet.Une fusion entre qui et qui ?
La BIU Santé dépend des trois universités Paris Descartes, Paris Diderot et Paris Sud-Orsay. Elle possède le plus grand fonds dans le domaine de la santé en France, et la valeur de son fonds ancien est reconnue internationalement. Son public est en majorité constitué de lecteurs extérieurs à Paris Descartes (praticiens, chercheurs, étudiants).Le SCD (service commun de la documentation) : c’est la bibliothèque universitaire de Paris Descartes. Multidisciplinaire, elle dessert principalement les étudiants de Paris Descartes.
Une fusion, pour quoi faire ?
Le président a précisé que la fusion n'aboutirait ni à des restrictions de personnel, ni à des restrictions budgétaires.Alors, quel est l’objectif, en terme documentaire ou de services ? Quels seront les bénéfices pour les usagers ?
Une collaboration entre les deux bibliothèque existe déjà, sans qu’elles soient fusionnées pour autant.
Depuis longtemps, la plus lourde dépense budgétaire, celle qui concerne l'achat des périodiques électroniques et des bases de données, a été mutualisée et optimisée financièrement entre les deux bibliothèques.
La direction de l'université a également engagé la BIU Santé, comme le SCD, dans le projet de "SGBm", un outil de gestion mutualisé qui remet en question presque toute l'organisation de la bibliothèque sans qu'il y ait eu de réflexion de fond préalable.
Il y a une grande incertitude sur les missions de la bibliothèque, y compris ses missions nationales, qu'on entend trop souvent restreindre au seul patrimoine. C'est la question majeure, d'où découlera toute l'organisation future. Peut-on restructurer avant d'avoir repensé ?
Une fusion, combien ça coûte ?
Sans doute très cher :- Aménagements immobiliers et mobiliers
- Création d'un nouveau site web (celui de la BIU Santé, énorme, n'a pas deux ans), peut-être d'un nouveau nom, d'un nouveau logo (et tout ce qui s'ensuit)
- Temps de réunion +++ au détriment du travail courant
- Temps d'information et de formation pour tous les agents, exigé par les réorganisations qui seront décidées
Quelles vont être les conséquences ?
Pour les usagers
- Le risque d’un accès plus limité ou payant pour les lecteurs extérieurs à Paris Descartes ?
Pour le personnel
- Aucune prévision à ce stade sur l'ampleur des réorganisations
- Gestion des carrières plus compliquée au niveau national (une motion en ce sens a été portée par les syndicats à la dernière CAPN de mai 2017, voir ici et ici).
Certains de nos collègues du SCD ne partagent-ils pas nos inquiétudes, et notre sentiment que nous ne savons pas où on veut nous mener ?
Et maintenant ?
Le président a annoncé une large consultation du personnel, pour que cette fusion soit "exemplaire".L'organigramme est naturellement de la responsabilité du chef d'établissement qu'est le président. S'agissant de la réorganisation des deux plus gros services de l'université, nous espérons cependant qu’un réel effort d'explication et d’écoute sera fait, dans le but de susciter l'adhésion du personnel.
Notre avis
Au fond, c'est le statut de toutes les bibliothèques interuniversitaires que l'autonomie des universités a remis en question. Par exemple l'université Paris 3 Sorbonne Nouvelle se sépare des bibliothèques Sainte-Geneviève et Sainte-Barbe (plus de détails ici et ici). La fusion n'est pas la solution automatique.L'université travaille pour 2019 à une fusion plus vaste, celle des universités Paris Descartes, Sorbonne nouvelle, Paris 13, et Paris Diderot, dans le cadre de la COMUE USPC. Il serait judicieux de travailler dès maintenant dans cette perspective, plutôt que de multiplier les fusions successives et coûteuses.
Nous espérons qu'une logique administrative qui nous semble trop éloignée des réalités techniques n'aboutira pas à mutiler un outil de travail auquel les usagers tiennent à juste titre.